Liberty-Jeep History WW II
Liberty-Jeep History WW II
Major général Walter Robertson - 2nd Infantry Division

 

 

 

Les combats pour TREVIERES  

Colonel Chester Hirschfelder -9th Inf Rgt

Trévières est un gros bourg normand situé en ligne droite au sud d’Omaha Beach, à environ 10 kms, et comptant approximativement 850 âmes. La proximité de cette plage qui en ce matin du 6 juin 1944 va recevoir les premières vagues d’assaut des troupes américaines de l’opération « Neptune » (traversée de la Manche par les alliés) puis de l’opération « Overlord » (Débarquement des roupes en Normandie) va lui causer bien des tourments. Les bombardements aériens qui précèdent l’assaut vont s’abattre sur la population et le jour J, ceux de la flotte ancrée au large des côtes vont prendre le relais. Si les habitants fuient vers les marais tout proches, emportant avec eux la centenaire du village (104 ans) dans une brouette, le bilan est déjà bien lourd et compte 16 morts et près de 50 blessés. Ils trouveront à leur retour un village totalement dévasté.

Grenadier-Regiment 916, 352. Infanterie-Division.

Les positions allemandes dans le secteur de Trévières

« A cette période de 1944, Trévières est le poste de commandement (gefechsstand) du Grenadier-Regiment 916 (352 Infanterie Division commandée par le général Kraiss) et dont le commandement est assuré par l’Oberst Ernst Goth. Il s’agit d’un régiment d’infanterie de la Wehrmacht qui a été réparti sur tout le secteur d’Omaha. Les compagnies postées en seconde ligne se trouvaient à Vierville-sur-Mer, Saint-Laurent-sur-Mer, Colleville-sur-Mer. Le I/916 a son poste de commandement à Ryes avec 4 Kompagnies, le II/916 : PC à Formigny - 5 Kompagnie PC à St Laurent sur mer, 6 Kompagnie PC à Le Buissonet, 7 Kompagnie PC à Surrain, 8 Kompagnie PC à Colleville –sur-Mer. »

Jusqu’alors la vie de l’occupant est relativement tranquille et la Normandie offre bien des agréments pour des garnisons postées loin du tumulte des combats et des régions où la Résistance est bien plus active. Mais, cela va changer du tout au tout à la veille d’un véritable cataclysme dans ce confort établi. Nous sommes à la veille d’une journée historique à tout point de vue. Le 6 juin 1944 est arrivé.

 

Après des débuts bien difficiles sur la plage d’Omaha où les pertes sont sévères face à un accueil musclé de la part des défenseurs en place dans leurs bunkers, les G.I’s des premières vagues reçoivent des renforts en continu et parviennent enfin à établir une tête de pont qui se solidifie d’heure en heure.

 

La 1st Infantry Division, commandée par le Lieutenant Général Clarence Ralph Huebner, qui a payé un large tribut sur « Bloody Omaha » (Omaha la Sanglante) a réussi à établir une tête de pont relativement précaire au soir du D-Day et le lendemain a avancé légèrement dans l’intérieur des terres accompagnée par la 29th Infantry Division sous les ordres du Brigadier Général Charles Hunter Gerhardt, avec l’appui de blindés. Le village de Formigny est en vue mais des groupes de résistance du 915 Infanterie Regiment en barre l’accès et le 26th Infantry Regiment, les « Blue Spaders » (1st Inf Div) qui s’y présentait et déjà largement éprouvé sur la plage lors du Débarquement, stoppe sa progression. Le 8 juin au matin, le 18th Infantery Regiment (*), arrivé en renfort,  lance sa B Company, appuyée par les chars Sherman M4 du 746th Tank Battalion, après une approche fructueuse par le Sud-Est, libère la position et installe ses 1st et 3rd batallions qui ont atteint la route de Caen à Cherbourg (RN 13) aux alentours du carrefour Bérigot près de Normanville (Formigny) dont le PC du II/916 s’est replié vers Trévières alors que la 2nd D.I du Major Général Walter Robertson y installera son Quartier général.

 

Ce régiment (18th I.R), commandé par le colonel George Smith, Jr., se trouve maintenant opposé à des groupes d’arrière-garde du GR 916 qui oppose une relative résistance pour faciliter le regroupement allemand sur des positions arrière. Afin de désorganiser cette manœuvre, G. Smith, Jr demande un soutien d’artillerie qui lui est apporté par la Navy qui arrose copieusement le village et ses alentours proches causant les premiers graves dommages.

 

(*) A Formigny, une plaque apposée sur le mur de la mairie et comportant les 2 insignes (1st & 29th Div) honore les hommes qui ont libéré le village et dessous est fixée une plaquette reprenant les noms de 4 soldats : Glenwood Hankins & James Lockhart de la 29th I.D et Franklin Price & Arthur Schintzel de la 1st I.D.

 

Concernant les effectifs de la 2nd Infantry Division, le 9th Infantry Regiment arrivé le premier dans l’après-midi se voit aussitôt confier la neutralisation des snipers postés aux alentours.

  • 9th Infantry Regiment « Manchu » (vient de « Mandchou » surnom reçu lors de l’expédition de secours en Chine lors de la rébellion des Boxers) – devise : Keep up the Fire (Maintenez le feu) – Régiment d’infanterie rattaché à la 2nd Infantry Division.

En fin d’après-midi, le 38th Infantry Regiment (2nd Infantry Division) commandé par le colonel Walter A. Elliot débarque sur Omaha Beach près de St-Laurent-sur-Mer et après un regroupement des effectifs et des matériels, il reçoit ses premières instructions et l’objectif qui lui est assigné par le Major Général Leonard Gerow, chef du V US Corps : le village de Trévières.

  • 38th Infantry Regiment, 2nd Infantry Division.

« Le 1st Battalion est commandé par le lieutenant-colonel Frank T. Mildren, le 2nd Battalion par le lieutenant-colonel Jack K. Norris et le 3rd Battalion par le lieutenant-colonel Malcom R. Stotts. Le 1st Battalion comprend 1 compagnie de commandement (Headquarters Company), 1 Compagnie de service et les compagnies A à D, le 2nd Battalion comprend 1 compagnie de commandement et les compagnies E à H et le 3rd Battalion comprend 1 compagnie de commandement et les compagnies K à M, vient s’ajouter le 2nd Engineer Battalion (Génie) avec 3 compagnies de A à C, le 2nd Battalion Medic (médical) avec également 3 compagnies de A à C, le 2nd Military Police platoon (police militaire), la 2nd Signal Company (signalisation), la Cannon Company, l’Anti Tank Company, la 702nd OD Light Maintenance Company (éclairage), la 2nd Quatermaster Company et la 2nd Cavalry Recce Troop (troupe de reconnaissance). »

 

La distance à parcourir parait relativement courte et la mission semble accessible et rapidement réalisable surtout avec le soutien d’une compagnie du 747th Tank Battalion, et d’une compagnie du 635th Tank Destroyer Battalion. Les régiments se mettent en mouvement le 9 juin. Mais, si rejoindre les positions du 18th Infantry Regiment, relevé par le 9th I.R, est aisé puisque déjà conquis, progresser au-delà est plus difficile que prévu. La présence de snippers se repliant au fur et à mesure de l’avancée du 38th I.R gêne la progression vers la rivière Aure qui coupe la D30 rejoignant Trévières. Plusieurs boy’s n’iront pas plus loin et parmi eux le Captain Omery C. Weathers * de la Compagnie K (DSC) tué net par le tir d’un snipper en se levant pour avancer avec ses hommes vers l’ennemi. Les autres (2nd Battalion) sous le commandement du lieutenant-colonel Jack K. Norris, dans la descente de la route de Formigny se dirigent vers Trévières mais doivent affronter d’âpres escarmouches et ne parviendront aux abords des premières habitations du nord de la bourgade qu’en début de soirée. En cette fin de journée du 9 juin 1944, le 38th Infantry Regiment est obligé de camper sur ses positions face à un ennemi solidement retranché et qui repousse toutes les tentatives d’intrusion dans le bourg à l’aide d’un feu nourri d’armes automatiques et de mitrailleuses. Dans un combat « urbain », l’avantage est toujours en faveur des défenseurs … 

 

Position de la rivière Aure par rapport à Trévières

Il faut absolument forcer ce verrou et faire intervenir une force de frappe plus évidente. Il est donc fait appel au renfort de la batterie C du 81st Chemical Weapons Battalion qui prend position et cerne le village et les positions ennemies par un feu sévère et relativement précis.

  • 81st Chemical Weapons Battalion (bataillon d’armes chimiques)

« En général, il s’agissait de bataillons de mortiers (mortiers chimiques de 4,2 pouces = 107 mm) qui n’étaient pas affectés aux unités mais attachés en soutien de celles qui allaient au combat. Les mortiers chimiques sont appelés ainsi car ils sont capables de tirer des obus explosifs (haute vélocité), des obus chimiques, à gaz, incendiaires et fumigènes. »

 

Afin d’intensifier la pression sur l’ennemi, des tirs sont également effectués par les 15th et 38th Field Artillery Battalions qui ont rejoint le Nord-Ouest de Trévières après que le Génie (Engineers) ait vérifié la stabilité du terrain devant recevoir les pièces d’artillerie compte-tenu de la présence des marais sur le secteur. La nuit tombée les tirs sont interrompus et des éclaireurs sont envoyés dans la localité à la recherche d’informations et constatent qu’une partie des Allemands se sont déjà repliés.

  • 38th Field Artillery Battalion, 2nd Infantry Division

« Régiment d’Artillerie de campagne équipé d’obusiers de 105 mm Howitzer M2A1. »

  • 15th Field Artillery Battalion, 2nd Infantry Division

« Activé le 1er décembre 1934 à Fort Sam à Houston (Texas), il est réorganisé et renommé le 1er octobre 1940 en tant que B Battery (Batterie B), 15ème bataillon d’artillerie de campagne. »  

Durant cette même journée, en début d’après-midi, le 9th Regimental Combat Team, commandé par le Colonel Chester Hirschfelder, avançant par l’Est, plein sud, laisse derrière lui Engranville. Le 2nd battalion arrive à traverser l’Aure, mais les chars qui l’accompagnent sont stoppés devant l’obstacle et il est pris à partie par des tirs ennemis provenant de l’Est de Trévières. Il progresse difficilement et une erreur de l’artillerie envoie un obus sur ses lignes et l’on dénombre 17 victimes. Plus au Sud-Est de Trévières, la route menant au village de Rubercy est atteinte en milieu de nuit. Le 3rd battalion avait quant à lui quitté Mandeville-en-Bessin et arrive à hauteur du Haut-Hameau où il rencontre un fort point de résistance qui le met en difficulté et il demande l’appui des artilleurs tant terrestre que naval afin d’assainir le secteur et peut rejoindre enfin la proximité de Rubercy au coucher du soleil.

 

Le 8 juin, des chasseurs bombardiers avaient effectué une mission de reconnaissance pour repérer des positions d’artillerie postées dans le bois du Molay-Littry qui pourraient contrecarrer les plans d’avancée mis en place, mais sans succès. Renouvelant l’opération le 10 juin à 7 h 47, les mêmes appareils ont plus de chance et détectant l’emplacement du regroupement, ils mitraillent les positions allemandes qui y sont installées. Le pôle est copieusement bombardé et totalement désorganisé. La fuite des artilleurs est de rigueur et ils abandonnent la position en hâte dans le plus pur désordre qui soit et la menace s’avère désormais éliminée.

 

Dès le lendemain matin, 10 juin 1944, Jack K. Norris et son 2nd Battalion poursuit la pression sur les derniers défenseurs encore postés dans Trévières qui s’est totalement vidé de ses habitants réfugiés dans les alentours ; certains vers l’Ouest jusqu’à Colombières, d’autres au Nord-Ouest vers Le Quévé et enfin vers l’est à La Perrouze et bien au-delà parfois. Pendant ce temps, l’étau se resserre et les hommes du 38th I.R constatent que les Allemands menacés d’encerclement, ont presque entièrement évacué le village. Les Américains maintenant infiltrés dans les premières rues du bourg éliminent quelques tireurs isolés durant la matinée pour enfin délivrer définitivement Trévières par un dernier assaut vers 8h00 et la prise de contrôle est totale et définitive vers 8h45.

Il aura fallu un jour et demi pour gagner cet engagement et commencer à rejeter l’ennemi plus au Sud en élargissant la tête de pont mais le village est en ruines suite aux derniers tirs d’artillerie ayant eu lieu à l’aube juste avant la dernière poussée. Ceux-ci ont été courts mais puissants, détruisant le rets du village pour le raser à quatre-vingt pour cent, le centre-ville n’existe plus. La grande majorité des Allemands avait décroché durant la nuit et effectué une retraite en direction de la forêt de Cerisy.

Trévières a retrouvé sa liberté mais la population est sinistrée et la reconquête a quand même un goût amer.

 

NB : Dans un article publié le 10.06.2020, le journal Ouest-France indiquera que le 38th Infantry Regiment enregistrera 96 morts et blessés dans la libération de Trévières.

 

Captain Omery C. Weathers – Service N) O.410223 – né le 4 février 1919, incorporé le 29 Mars 1941, domicilié avant-guerre à Mammoth Spring, Arkansas – Décès le 3 juin 1944 à proximité de Trévières – Décoré de la Distinguished Service Cross (DSC) et de la Purple Heart. Il est inhumé au cimetière américain de Colleville-sur-Mer – A.16.9

 

 

Texte Alain OCTAVIE

Mise en page du texte et des photos Yannick DEHAYES.